Impôt sur le revenu : un amendement LR (voté avec la soutien de la majorité présidentielle) prétend apporter de la clarté en entretenant la confusion sur le taux d’imposition
Un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2022 proposé par les députés Les Républicains (LR) a été voté avec le soutien de la majorité relative. Il consiste à faire figurer sur l’avis d’imposition des contribuables, en plus du taux d’impôt moyen, le taux marginal d’imposition, (c’est-à-dire le taux le plus élevé appliqué à la dernière tranche du revenu imposable).
L’information sera factuelle et correspondra certes à la réalité telle qu’elle ressort de l’application du barème progressif de l’impôt sur le revenu. Néanmoins, personne ne doit être naïf : cet amendement s’inscrit dans un long travail de sape engagé contre les impôts directs progressifs et plus globalement contre le rôle de l’impôt.
Cet amendement a en effet été déposé par les représentants d’un mouvement qui n’a de cesse :
• de demander une baisse du niveau des prélèvements obligatoires, sans jamais préciser les conséquences d’une telle proposition sur le niveau des services publics et de la protection sociale,
• de critiquer les impôts directs progressifs, pourtant les seuls à même de réduire les inégalités,
• d’entretenir, de manière générale, de nombreuses idées fausses sur la fiscalité, par exemple en déclarant qu’il faut réduire les droits de donation et de succession pour alléger les impôts des classes moyennes sans jamais préciser que la très grande majorité des successions ne sont pas imposables et qu’en conséquence, le taux effectif global d’imposition des successions en France est de 5 % (3 % entre parents et enfants),
• de dramatiser la fraude aux prestations sociales afin de mieux minimiser la fraude fiscale, alors que tous les travaux menés sur le sujet démontrent que la fraude fiscale est de très loin largement supérieure à la fraude aux prestations sociales, etc.
De la part de responsables qui véhiculent de tels discours trompeurs, un tel amendement ne peut laisser dupe personne. Il est destiné à entretenir la confusion à propos de termes (taux marginal, taux effectif) souvent mal connus et mal maîtrisés par la population. L’exemple suivant permet de le démontrer.
Un célibataire qui a déclaré 30.000 euros de salaires (son seul revenu) au titre de 2021 aura payé 2.022 euros en 2022. Compte tenu du barème, le taux marginal appliqué à son revenu sur sa dernière tranche est de 30 %. Mais son taux réel d’imposition est de 6,74 %.
Cet écart abyssal s’explique tout simplement par la progressivité de l’impôt sur le revenu. La part du revenu comprise entre 0 et 10.225 euros est ainsi imposée à 0 %. La part comprise entre 10.226 et 26.071 est imposée à 11 %. La part située au-delà est imposée à 30 % (compte tenu de l’abattement de 10 % pour frais professionnel, en l’espèce, seule la part comprise entre 27.00 et 26.071 euros est imposés à 30%).
En matière de pédagogie et de transparence, les responsables politiques seraient mieux inspirés de reprendre leur travail à la base en expliquant à quoi servent les impôts, en tirant honnêtement le bilan des mesures fiscales récentes et en prenant en compte les travaux alarmants menés sur la fraude fiscale.