Les prélèvements obligatoires plombent l’activité économique ? Tout faux...

, par Équipe de l’Observatoire

Combien de fois avez-vous entendu cet argument selon lequel toute hausse du niveau de prélèvements obligatoires serait néfaste pour la croissance et pour l’activité économique ? Plutôt qu’un long développement, nous répondrons ici en deux temps en montrant que :
1/ c’est au sein des pays riches, même libéraux, que le taux de prélèvements obligatoires est le plus élevé,
2/ la hausse du niveau des prélèvements obligatoires n’a pas nui à l’activité économique, au contraire.

Les pays pauvres présentent le taux de prélèvements obligatoires sur PIB les moins élevés

Rappelons le cœur du débat : lorsque le taux de prélèvements obligatoires (PO) est faible, ceci signifie que la couverture du système de protection sociale est faible et/ou que les services publics sont peu nombreux. Par conséquent, pour avoir le même niveau de couverture sociale ou accéder aux mêmes services que dans des pays comme la France, le niveau de cotisations payés aux acteurs privés (assurance santé privée, système éducatif privé, etc) est élevé.

• En 2022, le ratio moyen impôts/PIB (recettes fiscales totales, cotisations de sécurité sociale comprises, en pourcentage du PIB) des 36 pays africains couverts par l’étude de l’OCDE s’élevait à 16.0 %.

• En 2022, au sein de l’Union européenne, le moyen impôts/PIB s’élève à 40 %, précision étant apportée que la valeur du PIB y est beaucoup plus élevée.

Au-delà, à titre d’exemple, le taux de prélèvements obligatoires est d’environ 35 % aux États-Unis, le pays du néolibéralisme dont le système de sécurité sociale est géré très largement par le secteur privé. Mais globalement, dans les pays riches, le taux de prélèvements obligatoires rapporté au PIB est nettement plus élevé que dans les pays pauvres.

Depuis plus de 60 ans, la hausse du taux de prélèvements obligatoires a accompagné la croissance économique

Les deux courbes qui suivent sont également très instructives : elles montrent tout simplement que, historiquement, la hausse du taux de prélèvements obligatoires sur le PIB n’a pas bridé la croissance économique (nous reprenons ici le terme « croissance », bien connu de la population, sans ouvrir le débat sur la nature et l’impact de la croissance). Au contraire, elle l’a accompagnée.

Ceci s’explique aisément . Il est ici essentiel de rappeler le rôle des dépenses publiques dans la fameuse « croissance économique ». En effet, une hausse de l’investissement public engendre une hausse du revenu national plus importante. Les dépenses publiques se substituent également à la demande privée en période de crise, comme l’ont montré les plans de relance suite à la crise financière de 2008 et à la crise Covid. Lorsqu’elles financent l’éducation, elles permettent une hausse du capital humain et de la production (selon les théories dites de la croissance endogène). Il en va de même lorsqu’elles financent la recherche publique, puisque cela permet un développement du progrès technique.

Dit autrement, l’activité économique a besoin de travailleuses et travailleurs bien formé·es, ce qui est le rôle du système éducatif, assuré très majoritairement par le service public en France. Elle a également besoin de personnes en bonne santé, ce qui est possible grâce au système de santé géré par la Sécurité sociale. Elle a enfin besoin d’infrastructures (et d’investissements publics (et face au changement climatique, les besoins sont immenses) et de personnes qui consomment, ce qui est notamment rendu possible par le système de redistribution, qui assure un certain niveau de revenus, etc.

Le discours sur le « poids » des prélèvements obligatoires mérite mieux que des idées fausses ressassées dans le seul but d’appauvrir l’action publique et la protection sociale et de créer les conditions de leur prise en charge par le secteur marchand. Lequel se financera, bénéfice en plus, avec des prélèvements privés.