
On reparle de la taxation des « super héritages »
La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, s’est exprimée sur le futur projet de loi de finances pour 2026. Dans une interview donnée au quotidien Les Échos, elle s’attaque au dogme macroniste et gouvernemental consistant à refuser toute hausse d’impôt sur les plus riches et les grandes entreprises (le gouvernement n’étant par ailleurs pas gêné par l’introduction d’une « TVA sociale »*). Elle y déclare notamment que « On ne peut exclure d’emblée toute hausse d’impôts ». Elle propose même de « se pencher sur la taxation des "super héritages" ». Elle pointe notamment une réalité statistique : « 0,1 % des héritiers reçoivent des montants supérieurs à 13 millions d’euros et ne paient en moyenne que 10 % de droits de succession ».
Ce constat est factuel et implacable. Il est pourtant peu connu car peu abordé dans les « grands médias ». Certes, Attac ne partage ni les autres pistes évoquées par Yaël Braun-Pivet (comme celle de l’année blanche, qui, en matière d’impôt sur le revenu, rendrait imposables de nombreux foyers aujourd’hui exonérés en raison du niveau de leurs revenus), ni la politique qu’elle soutient. Mais nous reconnaissons que c’est tout le mérite de la présidente de l’Assemblée nationale de remettre dans le débat public la taxation des super héritages et de pointer une des injustices majeures du système fiscal.
Pour compléter le constat dressé dans cette interview, on rappellera que, selon l’INSEE, la moitié des ménages français ne bénéficie d’aucun héritage et que, pour ceux qui en reçoivent un, l’immense majorité n’est pas imposable (85 à 87 %) en raison de la faiblesse de la valeur du patrimoine transmis. France stratégie a, par ailleurs, calculé que le taux moyen d’imposition effectif sur les successions en France est d’environ 5 %, il s’abaisse même entre 2 % et 3 % pour les transmissions dites « en ligne directe » (entre parents et enfants). Mais si la plupart des ménages n’ héritent pas ou peu ,ceux ou celles qui héritent beaucoup ont vu leur part considérablement augmenter : le Conseil d’analyse économique a démontré que la part de la richesse héritée dans la richesse nationale s’accroît considérablement : elle en représente 60 % aujourd’hui, contre 35 % dans les années 1970.
Réformer les droits de donation et de succession pour qu’ils soient non seulement rentables sur le plan budgétaire, mais aussi plus équitables et progressifs est d’autant plus nécessaire qu’en France, d’ici à 2040, 9 000 milliards d’euros de patrimoine seront transmis.
Plusieurs chantiers doivent donc être engagés :
– plafonner le « Pacte Dutreil » (une exonération de 75 % sur la transmission de titres d’une société) afin d’épargner la transmission des PME mais de mettre davantage à contribution les transmissions organisées par les plus riches,
– remettre en cause les autres « niches fiscales », comme l’assurance-vie par exemple,
– revoir les barèmes d’imposition, aujourd’hui calculés selon le lien de parenté, afin de promouvoir un barème unique,
– revoir simultanément les abattements qui se superposent,
– rendre transparent et améliorer les données statistiques sur la valeur des patrimoines transmis par voie de donation et de succession.
* Lire l’ article d’ Attac "La TVA anti-sociale , d’un gouvernement anti -social"