Mission de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur la fiscalité du patrimoine : contribution d’Attac
Aborder la fiscalité du patrimoine implique nécessairement d’évoquer le rôle et l’évolution des prélèvements obligatoires (1) avant d’aborder plus spécifiquement la place de la fiscalité des revenus, de la détention et de la transmission du patrimoine puis d’analyser l’impact des mesures prises récemment (2), de prendre en compte les différentes formes d’évitement de l’impôt (3) et de remettre en perspective les politiques fiscales de la période, confrontées à nos propositions (4).
I/ Un haut niveau de prélèvements obligatoires qui s’explique par le choix de société
Les différents impôts sur le patrimoine s’insèrent dans le système plus global des prélèvements obligatoires (les impôts et les ressources sociales). Le niveau de ces derniers est élevé, puisque le pays a fait le choix de prendre collectivement en charge un certain nombre de besoins. Il en va notamment ainsi en matière de protection sociale : plus de la moitié des prélèvements obligatoires les cotisations sociales et la contribution sociale généralisée (pour ne citer que ceux-là) financent les caisses de la Sécurité sociale. Les impôts financent quant à eux notamment les services publics, comme l’éducation. Dans d’autres pays, le financement de la protection sociale est assuré par des prélèvements qui ne sont pas comptabilisés dans les prélèvements obligatoires (assurances maladie privées, fonds de pension pour les retraites, accords de branche pour les retraites, etc) tandis que des services, qui sont « publics » en France, relèvent du secteur privé. Les prélèvements nécessaires à la même couverture qu’en France peuvent donc être « obligatoires » au sens des conventions internationales ou non, ce qui rend délicat la lecture des comparaisons internationales.
À titre d’exemple s’agissant de la fiscalité du patrimoine, pour la Commission européenne, les impôts sur le patrimoine des entreprises et ménages représentaient 4,4 % du PIB en France en 2020, contre 2,6 % en moyenne dans la zone euro et 2,5 % dans l’Union européenne à 27. Si ce niveau s’explique essentiellement par le choix de prendre collectivement en charge différents besoins sociaux et économiques, il n’enseigne toutefois rien en matière de redistribution. Les impôts sur le patrimoine regroupent en effet différents impôts, dont la taxe foncière payée par plus de la moitié des ménages.
II/ Place de la fiscalité du patrimoine et bilan des mesures récentes
Les inégalités de patrimoine, y compris entre « riches »
Pour l’INSEE, les 10 % des ménages les plus aisés détiennent près de la moitié de l’ensemble du patrimoine des ménages, les 1 % en détenant 16 % (annexe 1). Si le patrimoine détenu par les ménages dits « à haut patrimoine » (qui détiennent au moins 607.700 euros d’actifs) se compose pour 51 % de biens immobiliers, de 24 % de patrimoine financier et de 19 % de patrimoine professionnel, celui des 1 % les plus riches est organisé différemment. Leur patrimoine est davantage constitué d’actifs financiers (pour 34 % contre entre 16 % et 22 % pour les autres ménages à haut patrimoine) tandis que l’immobilier ne représente que 30 %, contre 52 % à 70 % pour les autres ménages. Enfin, le patrimoine professionnel constitue 28 % de leur patrimoine contre 9 % à 21 % pour les autres ménages à haut patrimoine.
L’INSEE précise que « un de ces ménages sur deux est propriétaire d’au moins une entreprise dont la personne de référence ou le conjoint est le dirigeant, pour une valeur moyenne de 1,80 million d’euros. En corrigeant de l’endettement, la valeur des actifs de ces entreprises, nette des emprunts, représente 20 % du patrimoine net des ménages situés au‑delà du 99e centile de patrimoine brut. Entre 2010 et 2018, le seuil pour appartenir aux 1 % des ménages les plus aisés est passé de 1,78 à 1,86 million d’euros à champ comparable de patrimoine brut (...). Ces ménages détiennent en moyenne 4,02 millions d’euros » [1].
Panorama de la fiscalité du patrimoine
Pour le Conseil des prélèvements obligatoires, le poids de la fiscalité du patrimoine doit s’apprécier au regard de l’importance des dépenses publiques, donc du choix fait de disposer d’une couverture sociale et de services publics développés. Il souligne que « la fiscalité de l’épargne apparaît davantage fragmentée en France que chez nos partenaires, chaque produit d’épargne disposant de sa fiscalité propre et de nombreux régimes dérogatoires étant conçus pour orienter l’épargne des ménages » [2]
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