A/ Retour sur le cadre actuel
Le cadre de la gouvernance budgétaire est marqué par deux grandes lois organiques structurantes : la LOLF, pensée pour promouvoir un management tourné vers la performance, et la loi organique de 2012, qui décline les objectifs budgétaires européens.
1. Architecture, objectifs et bilan de la LOLF
L’ambition affichée de la LOLF était de passer d’une logique de moyens à une logique de résultats et de faire de la performance son orientation. Inspirée du modèle managérial de l’entreprise privée, la LOLF a été votée en 2001 dans un large consensus au parlement et appliquée à partir de 2006. Pour l’attribution des crédits, elle se décline en ensembles de politiques publiques, les missions, elles-mêmes subdivisées en programmes. Les missions sont le plus souvent interministérielles comme la mission « Sécurité » par exemple, subdivisée en plusieurs « programmes » (ordre public et protection de la souveraineté, sécurité et paix publiques, sécurité routière, police des étrangers et sûreté des transports internationaux, missions de police judiciaire et concours à la justice et commandement, ressources humaines et logistique).
Officiellement, la LOLF avait également pour objectif de revaloriser le rôle du Parlement. Les parlementaires peuvent en effet proposer des modifications à la répartition des autorisations de dépenses au sein d’une mission, qui est l’unité de vote, mais seulement si cela n’en augmente pas le volume global figurant dans le projet du gouvernement. L’information donnée aux parlementaires se doit d’être complète, exacte et sincère afin de favoriser le contrôle parlementaire et l’évaluation de la bonne utilisation des crédits.
Pour l’essentiel, les pouvoirs de contrôle du Parlement sont confiés aux membres des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat. Les commissions des finances des deux assemblées peuvent procéder à des investigations sur pièces et sur place ; conduire des auditions auxquelles les personnes convoquées sont tenues de se présenter ; demander la communication de renseignements ou de documents d’ordre financier et administratif et, enfin, le Parlement peut bénéficier de l’assistance de la Cour des comptes dans sa mission de contrôle des finances publiques. Celle-ci peut ainsi réaliser des rapports à sa demande, qui seront intégrés dans les rapports parlementaires.
La LOLF a profondément modifié le « management public », lequel inscrit dans la droite ligne du « nouveau management public », d’inspiration néolibérale et consistant, prosaïquement, à « faire plus avec moins ». Pour les inspirateurs et les partisans de la LOLF en effet, l’action publique est supposée être trop coûteuse et pas assez efficace. C’est la raison pour laquelle la LOLF a fait de la « performance » sa raison d’être. Celle-ci est mesurée par une série d’indicateurs qui figurent dans les documents et rapports thématiques annexés aux projets de loi de finances (on en dénombrait 676 en 2020).
L’objectif étant la compression de la dépense publique, notamment concernant des dépenses de personnel, la LOLF prévoit qu’une dépense de personnel puisse être économisée ou transformée en dépense d’équipement. L’inverse n’est toutefois pas possible. C’est ce que l’on nomme « fongibilité asymétrique des crédits » ; une notion qui, pour les agents publics, est emblématique de la façon dont la gestion des finances publiques a été orientée. Il s’agit en réalité d’un effet cliquet qui incite à réduire les dépenses de personnel. Et ce, avec des conséquences évidentes en matière d’efficacité de l’action publique mais aussi de dégradation des conditions de travail pour les agents publics.
Pour lire toute la note en pdf :